Chapitre 35 - ILIENA SORT DU COMA par Agathe
Le sommeil d’Iliéna est agité de rêves incohérents. Une succession d’images se superpose dans son cerveau endormi et son corps est secoué de soubresauts qui finissent par éveiller Lhiréou. — Que se passe-t-il Lhiréa ? Demande-t-elle mentalement à sa sœur, ces mouvements m’empêchent de me reposer et m’inquiètent. — Les humains font des rêves qui leur permettent d’évacuer leur stress ou d’exprimer les émotions de leur subconscient. C’est déroutant, mais tout à fait normal. — Oui, mais là je peux te dire que c’est le bazar dans sa tête. Tout se mélange. — Tout quoi ? Tu peux m’en dire plus sur ces images que tu vois défiler ? Tu dois reconnaître quelqu’un… — Eh bien, il y a des personnes que je n’ai jamais vues ! Je reconnais Julien, mais je vois aussi, des hommes qui bousculent Iliéna. Tiens revoilà Julien qui tient la main d’Iliéna… Maintenant, elle est dans une ville inconnue et d’autres hommes la font monter dans un hélicoptère avec deux autres filles… Quel charivari ! Lhiréa a peur de ce que lui raconte sa sœur. Elle vient de comprendre que les souvenirs de l’hélicoptère et de tous ces humains appartiennent à Iliéna, la terrienne. Mais comment cela se peut-il puisqu’il ne subsiste que l’enveloppe charnelle de la jeune femme, ? Son cerveau a été déclaré impropre à la vie, raison pour laquelle Lhiréou a investi son corps. — Écoute-moi Lhiréou : Un phénomène inconnu est en train de se produire. Il est provoqué par une émotion tellement forte qu’elle est en train de sortir Iliéna du coma qu’on imaginait irréversible. — Tu penses que le désir d’Iliéna pour Julien peut être assez intense pour induire une telle réaction ! — Le désir, fait, parfois, faire n’importe quoi aux Terriens. Oh non, regarde ! Il ne manquait plus que lui… La porte de la chambre s’entrouvre sur un Julien à peine éveillé. Il a entendu les gémissements de la jeune Ukrainienne et lui aussi s’est inquiété. — Iliéna, vous allez bien ? Souffle-t-il en pénétrant dans la chambre. Les rideaux sont restés ouverts, un rayon de lune éclaire le corps dénudé de la jeune femme. Sous l’agitation, le drap ne recouvre plus qu’une partie infime de son anatomie magnifique. Julien est tout à fait réveillé à présent. Il reste un instant béat devant la beauté du tableau qui s’offre à lui. Le désir le submerge et en deux enjambées, il se trouve tout près de la jeune fille qui semble apaisée depuis qu’il est entré. Comme si elle l’attendait… ! — Lhiréa, Iliéna est de nouveau calme et dans sa tête, je ne vois plus que des images de Julien, sur la plage, pendant le concert, au restaurant, à la conférence. Je ressens son émotion, c’est très doux, susurre Lhiréou, de peur d’éveiller la Terrienne. Pourvu qu’elle reste ainsi ! — Sans compter que j’ai comme l’impression que le don du passage génétique de Julien pourrait avoir lieu de façon imminente, la prévient sa sœur. — Tu croîs ? Cela m’intrigue et en même temps cela m’effraie un peu. — Laisse-toi aller dans le corps d’Iliéna, Lhiréou. N’oublie pas que je ne suis pas loin de toi, du moins par la pensée et que je peux agir grâce à l’interface bionique. Sauf si cela te gêne bien sûr. — Rien ne me gêne avec toi Lhiréa, c’est une expérience extraordinaire que nous allons vivre ensemble ! — Regarde, le processus est engagé ! S’exclame Lhiréa, tout excitée. Julien s’est agenouillé auprès de la jeune Slave. Il tend la main et ses doigts effleurent la joue d’Iliéna d’une légère caresse. — Iliéna ! Réveillez-vous, c’est moi Julien… Les yeux clos clignent, le rideau des cils se soulève lentement, laissant apparaître l’azur du regard troublé. — Julien ? Que faites-vous là ? — Vous avez crié dans votre sommeil, et je suis venu… Je peux partir si vous voulez ? Julien, si loquace et sûr de lui pendant la conférence, a du mal à trouver ses mots. — J’ai dû faire un cauchemar. Il y avait des hommes que je ne connaissais pas, ils me voulaient du mal…Je ne veux plus dormir Julien, j’ai trop peur de les revoir. Emmenez-moi quelque part, j’ai besoin d’air. Connaissez-vous un endroit calme ? Malgré la déception de ne pas rester seul dans cette chambre avec cette superbe créature, Julien répond : — Je connais un endroit idéal pour vous apporter la sérénité. Retournons sur la plage où vous m’avez sauvé. Il paraît que la lune est magnifique au bord de l’eau. — Quelle bonne idée, je n’ai jamais vu cela… — Jamais ? Comment est-ce possible ? — Vite Lhiréou rattrape cette gaffe, il ne va rien comprendre, le pauvre, prévient Lhiréa. Sur Terre, tout le monde connaît les nuits de pleine Lune ! — Je veux dire dans ce pays, ajoute Iliéna/Lhiréou avec un clin d’œil. Elle se lève prestement et enfile sans gêne aucune, à même la peau, la robe affriolante de la veille. — On y va ? Interloqué, mais toujours sous le coup de la séduction, Julien n’a d’autres solutions que de se lever à son tour. Il soupire : — Vous avez raison jolie dame, le grand air nous fera le plus grand bien à tous les deux. Dix minutes plus tard, un taxi les dépose au bord de la plage déserte. La nuit est extrêmement douce. Seul un léger souffle soulève les mèches blondes de la jeune femme et dénude son dos. — Venez, on fait la course jusqu’à la mer ! S’écrie Iliéna toute joyeuse de retrouver l’océan. — Hé attendez-moi ! Répond Julien en attrapant sa main. — Mais à quoi ils jouent ces deux-là ! Demande Lhiréou dans le corps d’Iliéna. — Ça fait partie du jeu de la séduction, une part importante du désir, Lhiréou, lui rappelle sa sœur. Tu sais que la passation du patrimoine génétique de cet homme ne peut passer que par ce processus. Laisse-toi porter sans te poser de questions et profite de cette expérience unique. — Je vais essayer de ne pas m’inquiéter. Advienne que pourra ! Souffle Lhiréou. Tu as raison. Oh ! On vient de tomber dans le sable ! Pouah ! J'en ai plein ma robe…Je veux dire, Iliéna en a plein sa robe ! Julien n’en croit pas ses yeux. En éclatant de rire devant son air médusé, la jeune femme, allongée de tout son long sur le sable, ôte sa robe sans aucune retenue et la secoue pour éliminer le sable. Décidément cette robe fait des allers-retours perturbant… Se dit–il, au comble de l’énervement. — Ça gratte ! Se contente d’ajouter la jeune femme en le regardant avec de grands yeux candides. — Vou..vous allez prendre froid jeune fille, bafouille-t-il. Lui au contraire a très, très chaud d’un coup… Iliéna ne répond rien. Un sourire très doux éclaire son visage angélique. D’instinct, elle place ses deux bras autour du cou du jeune homme et l’attire sur elle. — Pfff ! Elle est folle, il va nous écraser, S’inquiète Lhiréou. — Mais non, j’ai lu que les humains aiment cela et ils ont besoin d’être l’un contre l’autre pour l’échange. — Puisque tu le dis, mais je vais quand même surveiller qu’il ne nous fasse pas de mal, ce maladroit ! Oh mais qu’est-ce qu’elle fait ? C’est la deuxième fois qu’elle colle sa bouche sur la sienne. Je n’arrive pas à m’y habituer. Berk !!! En plus leurs deux langues sont en contact. C’est dégoûtant !. — Tu penses qu’ils ont l’air de trouver cela dégoûtant toi ? On appelle ça un baiser d’amour. Les Américains appellent "French Kiss "parce que soi-disant les Français en sont friands… — Hé bien merci, ce n’est pas terrible ! La main du glaciologue, qui ne mérite absolument plus ce titre, glisse entre les jambes de la jeune femme. Elle réagit avec un gémissement à la caresse. — Lhiréou, que ressens-tu ? Tu ne dis plus rien d’un seul coup. Es-tu toujours avec moi ? Demande Lhiréa à sa sœur. — Euh… Oui…Je suis là et en même temps je me sens toute bizarre. La voix interne de Lhiréou a changé, elle est plus basse, plus douce, et Lhiréa, devant les interférences de l’interface, comprend que sa sœur apprécie le geste de Julien. Quelle expérience fantastique ! Dans quelque temps, le jeune homme va faire don de son matériel génétique à Iliéna, et ainsi les Leauréliennes mettront leur projet à exécution. Les vêtements de Julien ont rejoint la robe d’Iliéna. — Tu es beau, lui dit-elle d’une voix enrouée. — Et toi tu es la femme la plus magnifique que je n’ai jamais rencontrée. J’ai envie de toi… — Attention Lhiréou ! Prépare-toi ! Maintenant, prévient sa sœur, n’aie pas peur, l’accouplement va avoir lieu maintenant. Tu vas bien ? Réponds-moi ! Lhiréou est bien incapable de répondre à sa sœur, elle est submergée par des sensations impossibles à décrypter. Bien malgré elle, les jambes de l’Ukrainienne s’écartent pour accueillir son partenaire. Un petit cri de surprise lui échappe — Oohh ! Oooohhhh ! De baisers en caresses, Julien et Iliéna/Lhiréou ne font maintenant plus qu’un, désormais. Les deux corps ondulent en cadence au rythme de l’amour. Lhiréou ne pense plus, ne communique plus avec sa sœur. Elle reçoit des ondes de plaisir, comparables à celles qu’elle éprouve quand elle nage au milieu des dauphins, à la différence que d’ordinaire la satisfaction reste cérébrale. Dans le cas présent, elle explose dans son ventre, envahi de toutes parts de sensations exquises, à chaque mouvement de son partenaire. Quelques gémissements s’échappent de sa bouche. Lhiréou ? Iliéna ? Elle ne sait plus vraiment qui elle est, elle a simplement envie que ce délice s’éternise. Dans un ultime soupir, Julien pénètre un peu plus le corps féminin, puis s’immobilise, la tête dans le cou de sa partenaire. Lhiréou se sent extrêmement bien dans le corps d’Iliéna... À cet instant précis, Iliéna ouvre les yeux comme des soucoupes. Elle pousse un hurlement en voyant un homme inconnu allongé sur elle. Il veut lui faire du mal lui aussi ! On a du la droguer ! Des images horribles s’imposent à son cerveau endolori. Elle se revoit avec Ludmilla et Guella en train de danser dans les boîtes de nuit de Cancùn, puis Alexei et Dragomir les emportant en hélicoptère vers le bateau privé américain, pour les livrer en pâture à des Russes libidineux, prêts à assouvir leurs instincts lubriques. Elle entend sa propre voix hurler : — Je ne suis plus d’accord, je te préviens dès qu’on sera sur le bateau. J’irai voir le commandant de bord ! À ces mots, elle prend la crosse noire du pistolet d’Alexeï en pleine tempe. Qui est cet homme sur elle ! Un des pourris friqués qui ne pense qu’à abuser des femmes, comme elle et ses amies ! C’est ce qu’il vient de faire, elle le sent. Elle le sait. — Nooon !!!! Plus jamais ça !!! Sale chacal ! Вид Разновидность свинины свинья ! Crache littéralement la jeune femme en russe. — Iliéna que vous arrive-t-il ? S’écrie Julien, affolé en se redressant à peine. Il n’a pas le temps d’esquisser un geste supplémentaire ni de comprendre la raison de l’explosion de colère d’Iliéna. La jeune femme a ramené ses jambes contre son torse, et les détend brutalement, de toutes ses forces. Le glaciologue se sent propulsé comme un pantin de chiffon. Sa tête, en heurtant le sol, émet un bruit de coquilles cassées. -Это служит вам правая свинина соли !!! C’est bien fait pour toi sale Porc ! S’exclame Iliéna. J’espère que tu vas crever ! À son tour elle s’écroule sur le sable et éclate en sanglots. Lhiréou est affolée. Elle ne comprend plus rien et surtout pas cette explosion de folie dans la tête de la terrienne. Elle ne la contrôle plus. — Lhiréa, au secours !!!! Que se passe-t-il ? Elle est devenue ingérable ! C’est affreux pour moi, je ressens un afflux de sensations épouvantables. C’est cela la colère ? Demande la pacifique Lhiréou, complètement déroutée. — Oui Lhiréou, c’est même de la fureur. Calme-toi et écoute-moi bien. Iliéna la Terrienne a refait surface, elle est sortie de sa période de comas et elle est redevenue elle-même, avec les souvenirs de sa vie d’avant, son mode de fonctionnement, sa façon de parle — Mais ce n’est pas possible, il faut que je sorte de là. Fais quelque chose Lhiréa ! Panique Lhiréou. — Calme-toi Lhiréou. Il n’y a qu’une seule chose à faire, reprendre le contrôle de l’esprit d’Iliéna. Mais tu vas devoir lui parler… — Elle va devenir complètement folle, mais je vais essayer…Obtempère Lhiréou Iliéna s’est assise et essuie son visage larmoyant. Elle observe l’homme immobile à ses pieds. — Dans quels draps me suis-je encore fourré, se lamente-t-elle, il faut que je me sauve d’ici… — Iliéna, Iliéna…Je suis Lhiréou… Entend-elle dans sa tête. — …………. ??? — Je suis Lhiréou de la planète Leaurélia, je suis là pour t’aider. Iliéna ouvre des yeux exorbités. Que lui arrive-t-il encore ? — Tu es tombée de l’hélicoptère tout au fond de l’océan et les dauphins t’ont sauvée. La jeune Slave secoue la tête pour évacuer le sentiment de mal-être et l’incompréhension qui envahit son cerveau. Elle devient folle, ce n’est pas possible autrement… Ou alors c’est la drogue…Oui, c’est sûrement la drogue. — Tu as été donnée pour morte et moi Lhiréou de Leaurélia, j’ai investi ton enveloppe charnelle pour te ramener vivante. Lhiréou comprend bien qu’elle n’arrivera pas à faire intégrer à Iliéna le fait d’être double. Elle décide de concentrer toute l’énergie psychique qui lui reste après cette épreuve, et de l’unir à celui de sa sœur, grâce à l’interface bionique. Lhiréa a compris et approuve mentalement. — Tu as raison Lhiréou, c’est le seul moyen, soupire-t-elle. L’union n’a jamais été aussi forte entre les deux sœurs. Pendant un instant, l’une et l’autre sont totalement connectées vers l’objectif à atteindre : endormir Iliéna. Dix secondes intenses, épuisantes, mais qui portent leurs fruits. Les paupières d’Iliéna frémissent et s’alourdissent pour se fermer totalement, La jeune fille a basculé sur le sable et ne bouge plus du tout. — Vite Lhiréa, maintenant il faut emporter les deux corps dans le vaisseau ! — Maintenant que Julien a donné sa semence, nous n’avons plus besoin de lui, laissons-le ici, propose Lhiréa. Lhiréou regarde le jeune homme au sol avec un pincement au cœur. Elle n’a pas oublié les sensations merveilleuses qu’il a provoquées en elle, Une sorte de tendresse à son égard s’est développée dans son cœur de Leaurélienne. — Non ! Emportons-le. Il peut nous être encore utile, souffle-t-elle à sa sœur. — Lhiréou, es-tu sûre de ne pas mélanger quelques sentiments humains dans ton raisonnement ? Ajoute-t-elle, en la grondant gentiment ? — Pfff !!! Bien sûr que non… Quelle idée !